Le temps devant-derrière

La fuite en avant, ça sert à rattraper le temps perdu. Plutôt désespérée, l’entreprise ! On court en avant-en arrière ! Ce qui donne l’impression que les heures et minutes se passent devant-derrière. Enfin, même mal passé, le temps reste indémodable. Il ne passe pas… de mode. A propos de mode : quelle apparence lui donner, au temps ? Il a des pattes de lièvre et de tortue. Non, ce n’est pas trois pas en avant, deux pas en arrière. C’est plutôt la course contre la montre - cette montre lente comme une tortue suisse - pour être dans les temps : vous vous rappelez le lièvre à la fin de cette fameuse course. La tortue, elle, se hâte lentement. Bref, on voit que les deux aiguilles de nos cadrans ne sont pas là par hasard : elles nous miment la démarche du temps : une patte de lièvre, une patte de tortue. Des heures ou des minutes, qui gagne ? Qui traîne de la patte ?

On a l’impression que notre montre farceuse va se transformer en pièce de monnaie pour jouer à pile ou face. Histoire de remettre les pendules à l’heure. Alors quoi, notre montre, ce serait le Graal du temps ? On n’y croit pas une minute, bien sûr, et nous voilà partis à la recherche du Graal perdu. Un pas de lièvre, un de tortue, on avance. On se moquait du fonctionnement primitif de notre montre, et nous voilà pourtant partis à le singer. C’est boîteux ! Nous voilà à vouloir prendre parti, à parier pour l’un ou l’autre des deux protagonistes de la course. On se surprend à dire au lièvre : “Vas-y ! Pose-lui un lapin, à cette fichue tortue !”. Un lièvre qui court contre (enfin avec : rappelez-vous la course en avant-en arrière du début) donc un lièvre qui court contre un lapin (le lapin d’Alice, toujours en retard), ça suggère déjà un rythme moins boîteux ! On se sentirait presque sur un pied d’égalité à l’écouter, ce rythme. (Galop du lapin, galop du lièvre). On la voit déjà fulgurer, la course du siècle ! Malheureusement, la fameuse fable nous dit que c’est la tortue qui fulgure et qui pose un lapin au lièvre. Inattendu, comme tiercé !Pour les joueurs de tiercé, le temps, c’est de l’argent. Mais pour les modistes, vous vous souvenez, ceux qui passent le temps devant-derrière - oh pas de doute, ce sont sûrement des saltimbanques, ils ne sont ni chair ni poisson, c’est-à-dire ni tortue, ni lièvre - pour ces modistes, donc, l’argent, c’est du temps.Je m’explique : ce ne sont pas les joueurs de tiercé qui sont dans la course ; c’est leur argent qui court. En résumé : le départ est donné, ça veut dire que des comptes courants sont ouverts. Tandis que pour les seconds, les modistes, tout tourne (et tic, et tac !) autour du carpe diem, de ce précieux temps d’aujourd’hui. Mais dans un cas comme dans l’autre (et tic, et tac !), le temps tourne rond : une aiguille de temps et une d’argent. “ - Quelle heure est-il ?” “ - Time is money !”. Dans cette affaire, où est la grande aiguille ? Où est la petite ? Alors là, chacun est libre de son lièvre et de sa tortue. De toute façon, ne nous laissons pas tourner la tête : à la fin, ça fera un compte rond.

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